Olivier BACH, dans son livre « Dieu et les religions à l’épreuve des faits », téléchargeable via : http://www.inexistencededieu.com (gratuitement, 1,8 Mo) pose une question intéressante, même pour un athée, à moins qu’il soit individualiste et indifférent à ce qui ne le concerne plus.
Il fait une distinction entre "Dieu surnaturel, qui n'a jamais eu d'interaction avec le monde vivant ET Dieu des chrétiens, des musulmans et des juifs, qui intervient en permanence sur les humains et l'univers". Son argument, évidemment pertinent, est que les caractéristiques précises par lesquelles ils définissent leur dieu ne correspondent à aucune réalité, ce qui démontre son inexistence.
J’arrive à la même conclusion, mais en d’autres mots.
En effet, je fais plutôt une distinction entre réalité objective, réelle, visible, concrète, incontestable, ET "réalité" subjective, personnelle, virtuelle, imaginaire, anthropomorphique, et donc illusoire.
Dieu n'est alors qu'une construction de l'esprit, et encore, à condition que celui-ci ait été influencé par une éducation religieuse.
La corrélation significative entre cette éducation et la fréquente persistance neuronale et donc comportementale de la foi constitue à mes yeux une « preuve » quasi « expérimentale » de l' "existence artificielle" de Dieu, et donc de son inexistence réelle. Cette inexistence est d'ailleurs confirmée par l'absence totale du moindre indice susceptible d'établir ne fût-ce qu'une présomption d'intervention divine : les guérisons "miraculeuses", par exemple, résultent de l'autosuggestion, de l'effet placebo, dont l'influence reste encore très peu étudiée.
Les observations psycho-éducatives quant à l’origine de la foi , d’une part, neurophysiologiques et génétiques quant à sa fréquente persistance d’autre part, tendent à démontrer l’existence imaginaire, anthropomorphique et donc illusoire de « Dieu », comme l’avait déjà pressenti S. FREUD dans « L’avenir d’une illusion ».
Rares sont hélas les scientifiques athées qui osent s’aventurer dans un domaine aussi complexe et aussi délicat, à la limite de l’objectif et du subjectif : à l’instar de Louis PASTEUR, pourtant croyant , qui laissait ses convictions au vestiaire avant d’entrer dans son laboratoire.
Ce n’est pas comme certains neurophysiologistes croyants, tels que le Canadien Mario BEAUREGARD, financé par la Fondation chrétienne Templeton, qui a sérieusement cherché l’ «antenne» que « Dieu » aurait placé dans le lobe pariétal droit pour recevoir sa « Révélation », avant de se rendre compte que l’expérience mystique relève de l’ensemble du cerveau (mais il a oculté le rôle de l’éducation, dont la sienne … !).
Les observations psycho-éducatives :
La peur des forces naturelles, l’angoisse de la mort, l’espoir d’une « âme » éternelle dans l’«au-delà», etc …, ont été déterminants.
L’anthropologue Davis Sloan WILSON voit d’ailleurs dans la religion un mécanisme évolutif et sécuritaire de « sélection de groupe » en vue de sa survie.
Deborah KELEMAN et Paul BLOOM ont compris, après Jean PIAGET, que les enfants sont animistes : ils attribuent une volonté et une intention à ce qui les entoure. C'est logique : déjà, par anthropomorphisme, les premiers hominidés pensaient pouvoir se protéger des forces de la nature par des sacrifices offerts aux « puissances » qui en étaient responsables à leurs yeux. Mais le cerveau des enfants n’est pas pour autant « programmé » (par qui d’ailleurs, ?!) pour croire en un dieu.
Dès 1966, le psychologue-chanoine Antoine VERGOTE, alors professeur à l’Université catholique de Louvain, a en effet montré, sans doute à son grand dam, qu’en l’absence d’éducation religieuse, la foi n’apparaît pas spontanément, et que la religiosité à l’âge adulte en dépend (et donc aussi, comme mécanisme de défense, la capacité évolutive du seul cortex préfrontal humain à imaginer un « Père » protecteur, substitutif et anthropomorphique, fût-il qualifié rationnellement d’ « authentique, épuré, présence Opérante du Tout-Autre », etc …
Les observations neurophysiologiques.
Comment expliquer la persistance neurophysiologique de la sensibilité religieuse, et donc la fréquente imperméabilité de tant de croyants, notamment créationnistes, aux arguments rationnels et scientifiques ?
L ’éducation religieuse, renforcée par un milieu croyant unilatéral, laisse des traces indélébiles dans le cerveau émotionnel, ce qui anesthésie, à des degrés divers, le cerveau rationnel et l’esprit critique, du moins dès qu’il est question de religion, et perturbe donc le libre choix ultérieur des convictions philosophiques ou religieuses.
L’éducation coranique, exemple extrême, en témoigne hélas à 99,99 % … (Inversement, chez les enfants de parents incroyants, la foi n’apparaît pas).
Des neurophysiologistes ont en effet constaté que chez le petit enfant, les amygdales (pas celles de la gorge mais du cerveau émotionnel) sont déjà capables, dès l’âge de 2 ou 3 ans, de stocker des souvenirs inconscients (donc notamment ceux des prières, des cérémonies, des comportements religieux des parents, …, sans doute reproduits via les neurones-miroirs du cortex pariétal inférieur.
Ces « traces » neuronales, renforcées par la « plasticité synaptique », sont indélébiles …
L’ IRM fonctionnelle tend à confirmer que le cortex préfrontal et donc aussi bien l’esprit critique que le libre arbitre ultérieurs s’en trouvent anesthésiés à des degrés divers, indépendamment de l’intelligence et de l’intellect, en matière de religion.
La « Révélation »,ou plutôt la « conversion », par exemple, de Paul CLAUDEL à N-D de Paris, ou du Dr Alexis CARREL, croyants dans leur enfance, s’est sans doute produite au moment où leur cerveau rationnel, éminent mais subjugué par des messages émotionnels, a « disjoncté » au profit de leur cerveau émotionnel, un peu comme, mutatis mutandis, lors d’un coup de foudre amoureux (pour un être bien réel, lui… !).
On comprend que, dans ces conditions, certains athées comme Richard DAWKINS, ou certains agnostiques, comme Henri LABORIT, au risque de paraître intolérants, aient perçu l’éducation religieuse précoce, bien qu’a priori sincère et de « bonne foi », comme une malhonnêteté intellectuelle et morale …
A mes yeux, soit dit en passant, l’honnêteté intellectuelle exigerait au contraire que l’influence des parents, légitime et constitutionnelle, mais unilatérale, soit compensée par l’école, au cours d’histoire ou de philosophie, par une information minimale, progressive, objective et non prosélyte, à la fois sur les options religieuses ET sur les options laïques, même si cela doit amener certains à conclure à l’existence imaginaire et illusoire de toute divinité ... L’humanisme laïque, la morale laïque, la spiritualité laïque, sont des alternatives prônant l’autonomie et la responsabilité individuelle, mais encore occultées par les religions …
Dans cette optique, bien qu’encore constitutionnel, l’enseignement confessionnel, survivance du Moyen Âge, apparaît comme élitiste, inégalitaire et obsolète. Dans un but d’égalité de droits, de mixité sociale et d’économie budgétaire, il devrait donc fusionner avec l’enseignement officiel et devenir pluraliste : les mentalités ont évolué !
Les observations génétiques.
Pourquoi la soumission est-elle commune à toutes les religions, surtout dans l’islam ? Comme l’avait déjà compris Desmond MORRIS, en 1968, dans « Le Singe Nu », Richard DAWKINS estime, dans « Pour en finir avec dieu », que du temps des premiers hominidés, le petit de l’homme n’a pu survivre que parce que l’évolution animale avait pourvu son cerveau tout à fait immature de gènes le rendant dépendant, et totalement soumis à ses parents (et donc plus tard à un dieu …).
Cela expliquerait que toutes les religions aient réussi aussi longtemps (mais de moins en moins sous nos latitudes) à imposer la soumission à un dieu et à des textes « sacrés », et que les sectes réussissent à exploiter la « quête de sens »...
Michel THYS à Waterloo
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